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On a marché sur la Une ! |
Joël de Rosnay invité par Ujjef
Parmi tous ceux qui affirment que l'Internet est un "outil politique" de profonde transformation sociale qui dessine les contours d'une réelle démocratie participative, Joël de Rosnay n'est pas en reste ! Dans son dernier livre "La révolte du pronétariat, des mass média aux média des masses", le Conseiller du Président de la Cité des Sciences et de l'Industrie et Président exécutif de Biotics, prédit l'avènement d'une nouvelle forme de lutte des classes dont les insurgés emprunteront les fabuleux réseaux du web ! A leur tête, des "pronétaires" qui détrôneront les "infocapitalistes" pendant que les consommateurs passifs seront remplacés par des "consomm-auteurs" actifs. Et les journalistes dans tout ça ? "Victimes" d'une nouvelle partition de l'information, ils deviendront, tout comme les communicants en entreprise, des "infomédiaires", des médiateurs en information signifiante qui devront revoir leur copie... Voici donc une interview "à l'ancienne" de ce nouvel héraut !
Que désigne ce mot "Pronétaire" ?
Joël de Rosnay : L'objectif du titre du livre "La révolte du Pronétariat : Des Mass Média aux Média des Masses" et du terme "pronétaire" (mot formé à partir de ceux qui sont pour et sur le Net), est d'être un peu provocateur, car ce sujet est grave et important pour l'avenir. Le modèle industriel traditionnel a conféré le pouvoir aux puissants par la centralisation des moyens de production et de distribution. Ils ont ensuite cherché à transposer ce modèle à la société de l'information. Or, les règles du jeu ont changé. La création collaborative et la distribution d'informations de personne à personne confèrent de nouveaux pouvoirs aux utilisateurs, jadis relégués au rang de simples "consommateurs". Ces nouvelles pratiques mettent désormais en cause les modèles traditionnels industriels et commerciaux de production et de distribution. Il m'est apparu essentiel d'expliquer en termes clairs pourquoi cette révolution s'apparente à une nouvelle "lutte des classes" entre les grands pouvoirs politico-industriels et la société civile.
Sommes-nous vraiment à l'aube d'une nouvelle lutte des classes ?
Joël de Rosnay : Ce nouveau pouvoir civil, cette démocratie de la communication et de la participation, s'appuie sur ce que j'appelle les "média des masses". Elle est catalysée par les dernières technologies de l'information et de la communication, auxquelles sont associés de nouveaux modèles économiques. Mais cette "lutte des classes" entre pronétaires et info-capitalistes (les détenteurs des contenus, des droits, des grilles de programmes...), n'a évidemment que de lointaines ressemblances avec la lutte des classes, politique et économique, du modèle industriel classique décrit par Karl Marx. On assiste plutôt à une re-définition de territoires de compétences et à l'émergence de nouveaux modèles économiques.
Quelles en sont les raisons ?
Joël de Rosnay : Une des principales raisons de la montée du pronétariat et de l'influence croissante des “média des masses“ est la crise de confiance des lecteurs et des utilisateurs vis-à-vis des mass média traditionnels. Le résultat le plus frappant de cette crise de confiance est la baisse alarmante de la diffusion des journaux, en particulier des quotidiens, même si d'autres phénomènes y concourent. Une autre raison est le succès croissant d'Internet et surtout la création d'information par les internautes eux-mêmes.
A ce titre, les blogs sont révélateurs de cette mutation...
Joël de Rosnay : Le phénomène des blogs a contribué à inonder le Net d'informations de qualité très diverse mais souvent originale. La création de contenus par les pronétaires gagne progressivement du terrain. Après la musique et les films, les nouveaux domaines conquis sont l'édition presse comme le montrent l'avènement et le succès des journaux en ligne rédigés par des "bloggeurs" ou des non journalistes. Un des premiers "journaux citoyens" européen, AgoraVox, à été lancé en France en juin 2005 par la société Cybion spécialisée dans la recherche d'information sur Internet. Dix mois après son lancement, le journal compte plus de 2 600 rédacteurs réguliers et accueille près de 480 000 visiteurs par mois.
Ces révolutions technologiques sont-elles les ferments d'un nouveau modèle économique ?
Joël de Rosnay : Ces évolutions technologiques risquent de déstabiliser les modèles économiques traditionnels. Une simple "équation" : flux + buzz = bizz (business), indique que l'on peut gagner de l'argent par la gratuité. Il suffit d'attirer les internautes sur un site "fun" et gratuit et leur vendre des produits ou des services à bas prix. Les internautes, contents de ces services personnalisés, feront donc eux-mêmes le marketing gratuitement : c'est le "buzz" ; le tout selon le principe qu'il vaut mieux gagner 10 centimes d'euros sur 10 millions de personnes avec une marge de 90% (ce qui fait 900 000 euros), plutôt que 10 euros sur 10 000 personnes avec une marge de 30%, compte tenu des investissements et des frais de marketing, (ce qui ne fera que 30 000 euros).
Pourquoi parler des "média des masses" et non pas de "média des individus" ?
Joël de Rosnay : On voit effectivement proliférer sur le Net des "entreprises unipersonnelles multinationales". Ces dizaines de millions "d'actionnaires" de demain participeront, rémunérés ou non, dans l'intérêt du plus grand nombre, à la création collaborative de logiciels libres, de contenus éducatifs, d'émissions de télé, de musiques ou de livres. Les consommateurs "passifs" deviennent -en tous cas pour ceux qui le souhaitent ou le peuvent- des "consomm-auteurs". Des talents existent. La communication transversale (tous vers tous) et la comparaison les font émerger. Alors qu'aujourd'hui encore, pour être publié, édité, diffusé, vu à la télé, il faut passer par des comités de sélection favorisant les talents déjà confirmés. C'est pourquoi de nombreux jeunes auteurs se font connaître directement sur le Net.
Quels seront le futurs détenteurs du web ?
Joël de Rosnay : Je ne pense pas que les pronétaires vont éliminer les info-capitalistes. Les grands éditeurs et même les "majors" de la vidéo et de la musique, commencent à réaliser qu'ils ont tout intérêt à collaborer avec les pronétaires et les blogueurs. Par ailleurs, Google, Yahoo, E-bay ou Amazon sont des modèles, certes capitalistes au sens classique du terme, mais aussi "mutualistes" en quelque sorte. Il existe une complémentarité entre l'intérêt des usagers et les revenus engrangés par ces entreprises. A quel niveau se situera le pouvoir d'informer ? Les pronétaires sont présents tous les jours dans la blogosphère. Ils arrivent même à boycotter des produits ou à contrer les discours de personnalités politiques. Certes, nos démocraties se sont construites avec la liberté de la presse et aujourd'hui, à trop critiquer les média traditionnels, on risque de discréditer, voire de détruire un des fondement de la démocratie. C'est pourquoi la presse traditionnelle doit être absolument préservée.
Comment concilier conservation et innovation dans la presse traditionnelle ?
Joël de Rosnay : Elle doit aussi évoluer. Ces formes de communication transversales font émerger des communautés, des groupes, des "continents" d'idées, de valeurs partagées. Pour le meilleur ou pour le pire. La démocratie c'est vivre ensemble dans toutes les diversités possibles. Mais la démocratie virtuelle ne peut, en aucun cas, remplacer la démocratie réelle. Le contact humain, la confrontation sociétale, l'écoute des autres dans des situations de proximité physique (quartiers, villages, associations, clubs, partis, syndicats, lobbies, confessions religieuses...) n'est pas remplaçable par l'électronique, le haut débit, les blogs ou les SMS !
Les journalistes et communicants d'entreprises auront-ils encore une place ?
Joël de Rosnay : Les communicants en entreprise et certains journalistes deviendront des "infomédiaires", des médiateurs en information signifiante. Les pronétaires, je l'ai dit, ne font plus confiance aux média traditionnels et aux média dominants. Pourquoi se fier à des médiateurs qui ont leur "ligne éditoriale", un espace limité, pas de commentaires à leurs articles et aucune acceptation de contestation à posteriori de leurs assertions ? Les blogueurs savent aujourd'hui comparer, discuter, commenter, traquer les erreurs. C'est une nouvelle lecture de la presse en ligne, représentée notamment par les journaux dits "citoyens". Avec l'explosion du nombre de photophones et de mini caméras numériques, des "citoyens reporters" seront présents partout et témoins de grands évènements. Aux média traditionnels de savoir les utiliser au bénéfice de tous en assurant sélection, vérifications, médiation, qui resteront en majeure partie l'apanage de ceux qui ont une "marque", représentent une "référence" et ont la confiance de leurs lecteurs depuis des dizaines d'années.
Selon vous, après tant d'évolutions technologiques, quels seront les rêves de l'homme de demain ?
Joël de Rosnay : Se débrancher ! Peut-être qu'un de nos derniers privilèges sera de refuser d'être connecté en permanence sur Internet ! Et cela, pour pouvoir se "rebrancher" sélectivement, en fonction de choix, de valeurs, de critères de sélection. C'est-à-dire par l'exercice de sa responsabilité. Il reste beaucoup à faire avant de voir émerger les prémisses d'une véritable démocratie participative et d'une co-régulation citoyenne des grands systèmes de communication de demain. Autant commencer dès maintenant en mettant en œuvre le pouvoir des réseaux collaboratifs. A l'exercice solitaire de l'intelligence élective, préférons l'exercice solidaire de l'intelligence collective !
Le site de Joël de Rosnay, le Carrefour du Futur
Le site autour du livre "La révolte des Pronétaires"
Le site d'AgoraVox, le média Citoyen
Le site de la Cité des Sciences et de l'industrie
avril 27, 2006 dans Revue de presse | Permalink | Commentaires (0) | TrackBack
Les internautes reprennent le pouvoir |
Par Marion Rojinsky (La Tribune)
[...]Les inter- internautes sont devenus des « pronétariens », assène Joël de Rosnay, dans son dernier ouvrage la Révolte du pronétariat. Le citoyen internaute n'est plus « relégué au simple rang de consommateur», il prend le pouvoir, bouscule les marques, les entreprises et les gouvernements.[...]
avril 25, 2006 dans Revue de presse | Permalink | Commentaires (0) | TrackBack
Les mass média et la culture de la rareté |
Critique du livre par Freddy Mallet.
Si on cite dans sa globalité le titre du dernier livre de Joël de Rosnay sorti en début d’année ça donne: ‘La révolte du pronétariat : des mass media aux média des masses‘. Le fait que le web soit à l’origine d’une confrontation majeure entre les tenants institutionels de l’information (TF1, Fox News, Le Monde, Liberation, Universal, Time Warner, etc..) qu’on appelle les mass media, et vous et moi au travers les media des masses (blogs, wikipedias, YouTube, Flickr, emule, etc..) n’est pas franchement une révélation. Par contre là où le livre m’a franchement éclairé c’est sur la nature de la confrontation.[...]
avril 7, 2006 dans Revue de blogs | Permalink | Commentaires (3) | TrackBack
La révolte du pronétariat : Joël de Rosnay entre Marx et Wiener |
Critique du livre par Philippe Deracourt.
Joël de Rosnay, avec ce dernier livre écrit en collaboration avec un doctorant de Paris X, Carlo Revelli, fait mouche par un titre évocateur d’un passé glorieux. L’invention de ce néologisme « pronétariat » donne à penser que les forces productives assimilées aux ouvriers trouveraient une nouvelle portée révolutionnaire en se reconstituant grâce à internet.
L’homme symbiotique d’un précédent ouvrage devient le nouveau prolétaire. L’impression générale de ce dernier livre, empreint d’une grande générosité humaine, reste malgré tout marquée par une certaine naïveté dans la perception des rapports sociaux.[...]
avril 4, 2006 dans Revue de blogs | Permalink | Commentaires (1) | TrackBack
La révolte du pronétariat |
Critique du livre par Sciences et Avenir.
Cinq ans après l'explosion de la bulle spéculative, la révolution Internet n'est pas morte, à en croire Joël de Rosnay. Et ses vainqueurs seront les citoyens, rebaptisés "pronétaires". Les échanges de fichiers, les élaborations collectives et autogérées de contenus sont les prémices d'une démocratie renouvelée. Les médias des masses l'emporteront sur les mass media : les pronétaires sur les infocapitalistes. Au-delà du discours, le livre est un intéressant catalogue des innovations techniques disponibles sur le Web.
avril 3, 2006 dans Revue de presse | Permalink | Commentaires (0) | TrackBack
Les blogs, de nouveaux outils pour l'IE |
Par Jean-Paul Pinte (Veille).
[...]Pour Joël de Rosnay, les techniques et pratiques pro- proposées par le Web 2 O vont posées révolutionner l'histoire de l'humanité, tant sur le plan économique que social ou politique. Or ni les médias traditionnels, ni les dirigeants (comme le souligne plus loin Christophe Deschamps) ne semblent avoir saisi l'ampleur de ces enjeux. Blogs, wikis, "journaux citoyens ", préfigurent les principes d'une économie qui reposera sur des relations de pair a pair.
Dépassée la distribution de masse de contenus culturels, caractéristique des média dominés par les "infocapitalistes". Aujourd'hui se développe un "pronétariat", classe d'usagers capables de produire, de diffuser et de vendre des contenus non propriétaires, maîs aussi de permettre un accès largement
gratuit à l'information. Attention, révolution en marche. Pleine de promesses et probablement de désordres pour les équilibres.
avril 3, 2006 dans Revue de presse | Permalink | Commentaires (0) | TrackBack
Interview de Joël de Rosnay par le Bulletin des élus locaux |
À l'occasion de la sortie de son livre « La Révolte du pronétariat », le BEL a voulu faire le point avec le scientifique et essayiste sur les enjeux, tant économiques, sociaux que politiques, liés à l'émergence de nouvelles techniques et pratiques sur Internet... ( à lire dans le n° d'avril 2006)
avril 3, 2006 dans Revue de presse | Permalink | Commentaires (0) | TrackBack